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Pourquoi vouloir appauvrir les fonds en euros existants pour doper les fonds Euro Croissance ?

Achevé de rédiger le 02/11/2015

Euro Croissance : Pourquoi vouloir appauvrir les fonds en Euro existants pour doper un dispositif inadapté à la configuration actuelle des taux ?

Issus du rapport « Berger-Lefebvre » au même titre que les contrats Vie Génération, les fonds Euro Croissance étaient censés écrire une nouvelle page de l’assurance-vie en proposant des supports garantis non plus au jour le jour mais seulement à une échéance déterminée (située à 8, 10, 12, 15, 20 ans voire au-delà).

Le principe de base des fonds Euro Croissance était simple : En ne fixant une garantie en capital qu’à une échéance lointaine, cela devait permettre aux assureurs-vie de diversifier davantage leurs actifs, c’est-à-dire d’investir davantage sur des actions, de l’immobilier, des infrastructures… L’objectif pour l’Etat français était de drainer un peu plus des investissements des sociétés d’assurance-vie vers l’économie réelle. Pour les assureurs-vie, les fonds Euro Croissance devait permettre de réduire les besoins en marge de solvabilité dans le cadre des nouvelles normes Solvabilité II.

L’idée initiale des fonds Euro Croissance constituait a priori un triptyque gagnant :

pour le client :

Un rendement financier potentiellement meilleur à un terme déterminé, dans un contexte où l’on sait que la baisse des taux des obligations va induire une poursuite de l’érosion du rendement des fonds en euros « classiques ».

Une garantie (partielle ou totale) du capital initialement investi, celle-ci n’étant toutefois plus quotidienne (comme pour les fonds en euros « classiques »), mais uniquement à l’échéance contractuelle prévue de l’investissement.

pour l’assureur-vie :

Une limitation du besoin en marge de solvabilité dans le cadre des nouvelles normes prudentielles Solvabilité II applicables à compter du 1er janvier 2016, cette économie étant notamment induite par la suppression de la garantie au jour le jour du capital investi par le client.

Une limitation des investissements dans des obligations à trop faible rendement (comme l’OAT à 10 ans) pour lesquelles l’assureur-vie sait qu’il prend le risque de pertes financières futures en en acquérant des volumes significatifs.

pour l’Etat français et l’économie :

Un volume potentiellement plus important investi par les assureurs-vie dans l’économie dite « réelle », par le biais de l’acquisition d’actions d’entreprises, du financement de projets d’infrastructures (lignes de TGV ou centres commerciaux, par exemple).

Une limitation des risques pris par les assureurs-vie dans leurs fonds en euros « classiques », dans un contexte où il devient très difficile de trouver des actifs financiers dans lesquels investir les flux de collecte.

Mais la forte baisse des taux d’intérêts (avec une OAT à 10 ans à 0,77 % au 30 octobre 2015) rend le montage de fonds Euro Croissance difficile. En effet, la prise de risque (en termes de diversification d’actifs) ne peut se faire que sur les coupons attendus sur la partie obligataire. Or à 0,77 %, on ne peut plus attendre grand-chose. D’autant plus que la gestion d’un fonds Euro Croissance requiert des frais de gestion qui viennent réduire encore plus le piètre rendement prévu des obligations en portefeuille. En faisant l’hypothèse que le coût de gestion financière d’un fonds Euro Croissance est de l’ordre de 0,30 % par an, l’achat d’une obligation dont le rendement est de 0,77 % ne permet de diversifier l’actif qu’à hauteur de 10 x (0,77 % - 0,30 %) = 4,70 %.

Afin de sauver ce dispositif (qui a été conçu à une époque où le taux des obligations n’était pas aussi bas), le Gouvernement prévoit désormais d’autoriser les assureurs-vie à transférer une partie des obligations (antérieures et acquises dans le cadre de leurs fonds en Euro « classiques ») doté d’un rendement supérieur vers leurs fonds Euro Croissance.

Concrètement, cela revient à prendre une partie de la richesse constituée grâce aux épargnants (d’hier) sur les fonds en Euro pour la transférer sur des fonds Euro Croissance. L’objectif du Gouvernement est à la fois de faire chuter le rendement des fonds en Euro « classiques » et de donner une « petite » chance de développement aux fonds Euro Croissance.

Si un effet « vitamine » ponctuel est possible, la manœuvre ne changera rien au fait que les fonds Euro Croissance sont totalement inadaptés à la configuration actuelle des taux d’intérêts.

A nouveau, notre recommandation est de faire simple et concret. Rien ne vaut une « bonne » allocation d’actifs sur son contrat d’assurance-vie avec 70 % de fonds en euros et 30 % d’unités de compte investis dans des supports lisibles et de qualité.

Les fonds Euro Croissance pourront être relancés le jour où les taux d’intérêt remonteront, ce qui permettra leur montage « naturel » et « sans dopant ».

Cyrille Chartier-Kastler

Fondateur de GoodValueforMoney.eu

Rédigé par Cyrille Chartier-Kastler

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